Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
2 octobre 2011 7 02 /10 /octobre /2011 09:06

Rêves en désordres

Je rêve d’îlots rieurs et de criques ombragées
Je rêve de cités verdoyantes silencieuses la nuit
Je rêve de villages blancs bleues sans trachome
Je rêve de fleuves profonds sagement paresseux
Je rêve de protection pour les forêts convalescentes 
Je rêve de sources annonciatrices de cerisaies
Je rêve de vagues blondes éclaboussant les pylônes
Je rêve de derricks couleur de premier ami
Je rêve de dentelles langoureuses sur les pistes brûlées
Je rêve d’usines fuselées et de mains adroites
Je rêve de bibliothèques cosmiques au clair de lune
Je rêve de réfectoires fresques méditerranéennes
Je rêve de tuiles rouges au sommet du Chélia
je rêve de rideaux froncés aux vitres de mes tribus
Je rêve d’un commutateur ivoire par pièce
Je rêve d’une pièce claire par enfant
Je rêve d’une table transparente par famille
Je rêve d’une nappe fleurie par table
Je rêve de pouvoirs d’achat élégants
Je rêve de fiancées délivrées des transactions secrètes
Je rêve de couples harmonieusement accordés
Je rêve d’hommes équilibrés en présence de la femme
Je rêve de femmes à l’aise en présence de l’homme

Je rêve de danses rythmique sur les stades 
Et de paysannes chaussées de cuir spectatrices
Je rêve de tournois géométriques inter-lycées
Je rêve de joutes oratoires entre les crêtes et les vallées
Je rêve de concerts l’été dans les jardins suspendus
Je rêve de marchés persans modernisés
Pour chacun selon se besoins
Je rêve de mon peuple valeureux cultivé bon
Je rêve de mon pays sans torture sans prisons
Je scrute de mes yeux myopes mes rêves dans ma prison. 

 

Serment

Je jure sur la raison de ma fille attachée

Hurlant au passage des avions

Je jure sur la patience de ma mère

Dans l'attente de son enfant perdu dans l'exode

Je jure sur l'intelligence et la bonté d'Ali Boumendjel

Et le front large de Maurice Audin

Mes frères mes espoirs brisés en plein élan

Je jure sur les rêves généreux de Ben M'hidi et d'Inal

Je jure sur le silence de mes villages surpris

Ensevelis à l'aube sans larmes sans prières

Je jure sur les horizons élargis de mes rivages

A mesure que la plaie s'approfondit hérissée de lames

Je jure sur la sagesse des Moudjahidine maîtres de la nuit

Je jure sur la certitude du jour happée par la nuit transfigurée

Je jure sur les vagues déchaînées de mes tourments

Je jure sur la colère qui embellit nos femmes

Je jure sur l'amitié vécue les amours différées

Je jure sur la haine et la foi qui entretiennent la flamme

Que nous n'avons pas de haine contre le peuple français.

Alger, le 15 décembre 1960

(Chants pour le onze décembre, p. 23)

 

Nuits algériennes

La nuit, longue est la nuit

Les gens en tremblent

Le lion est détrôné

C'est le règne du chacal

(Paroles d'un prélude algérois)

Pincer sur une guitare

Khaït laoutar et chasser l'ennui

C'est facile mes frères

Utiliser sur le métier

Khaït men smaâ et rêver de pluie

C'est facile mes frères

Ceindre sur le front de la ville

Khaït errouh et l'espoir luit

C'est facile mes frères

Trancher au boussaadi

Khaït el ghord et tuer la nuit

C'est facile mes frères

Mais dire

La plainte du cèdre déraciné

Mais taire

Les mille souffrances de la chair

Quand les tenailles arrachent l'ongle

Ce n'est pas facile mes frères

O donnez-moi le souffle de Belkhaïr

Pour dire les nuits dénaturées

Pour dire les nuits algériennes

(Ecrit à Alger en 1961, Publié par Denise Barrat, Espoir et Parole, Seghers.)

Partager cet article
Repost0

commentaires

 

Commandez, vous aussi, "Le musc et le fichu " de Moussa Tertag chez

EDILIVRE

Rechercher